« Le narrateur vit avec ses parents et ses quatre grands-parents à Pékin, grande capitale surpeuplée. Il est programmeur et participe à la construction du Grand Firewall, sorte de nouvelle Grande Muraille informatique, empêchant quiconque d’apporter une voix contraire à celle du Parti. Il construit l’anti-dictionnaire et bloque tous les mots catégorisés « dangereux ». de « jours paisibles » à « chute des prix de l’immobilier », il en libère parfois aussi, quand ça les arrange. Comme avec les « agitateurs » de Hong Kong par exemple, utilisé pour critiquer le comportement des Hongkongais, qualifiés de violents et agressifs.
Le narrateur est en âge de se marier. Ses parents lui trouvent la femme parfaite : elle vit avec sa famille dans un hutong, maisons traditionnelles de Pékin. Or, « qui ne tomberait amoureux, devant un patrimoine d’une telle valeur ? »

Le narrateur, ce « tâcheron d’internet » est persuadé de faire le bien, du moins au début. Quand le coronavirus fait son entrée en Chine, dans les foyers et sur les réseaux sociaux, la parole commence à s’échauffer. Des questions et critiques fusent et pour le narrateur, c’est le moment de bloquer. Encore et encore. Cependant, la situation aussi bien sanitaire que sociale continue de se dégrader et bien qu’il tente de protéger sa famille, ses croyances se fissurent. Car il sait. Il a accès à toutes les “connaissances interdites”, il les étudie pour mieux les contrer. 
La situation se dégrade jusqu’à l’effondrement, ‘bengkui’ qui emporte tout, l’histoire, la famille, la sécurité et la foi en toute forme d’humanité. 

Dans un style à la fois drôle, ironique allant jusqu’à l’absurde, l’auteur caché derrière le pseudonyme S.X dépeint la réalité et un futur terrible, anéanti de cette Chine contrôlée par ses dirigeants mais aussi par sa propre population.

L’absurde prend tout son sens dans cette société chinoise obsédée par les réseaux sociaux, comme la famille du narrateur qui ne se parle plus que par émoticônes. Quand la peur d’être infecté par le coronavirus et les stupidités qui en découlent s’y mêlent, là encore, l’absurde est la meilleure des réponses. Pourtant, ce texte est aussi une lettre d’amour et un acte de reconnaissance envers cette Chine millénaire, son histoire incroyable petit à petit effacée, elle aussi, par le gouvernement. La richesse des textes classiques, les évolutions de la ville de Pékin, les révolutions qu’a connu le pays sont évoquées par le narrateur qui se rend compte des modifications artificielles et absurdes imposées à son pays. Toute cette grandeur et ces connaissances effacées aussi facilement que les traces des manifestations de la place Tian’anmen en 1989 l’ont été sur internet. 
Ce roman fut loin d’être facile à lire. Les références à l’histoire de la Chine sont nombreuses et la construction du récit complexe. Toutefois, le rythme de cette cybercomédie montant crescendo jusqu’à une apogée apocalyptique incroyable et cette traduction qu’on sent excellente ont fini par me happer. » Clémence, Librairie Le Phénix – Paris